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La séparation des critères de sélection des candidatures et de jugement des offres

Auteur : Cabinet d'avocat ROUSSE ET ASSOCIES
Publié le : 18/12/2009 18 décembre déc. 12 2009

Le pouvoir adjudicateur est tenu d'indiquer, dès la mise en concurrence d'un marché, les critères de sélection qu'il utilisera pour la sélection ainsi que le niveau de capacités spécifiques qu'il exige éventuellement de la part des opérateurs économiques.

La prise en compte des moyens humains sur le chantierDans le cadre de cette procédure le Code des Marchés publics distingue nettement la sélection des candidatures et celle de jugement des offres.

Il est en effet constant que la première phase doit permettre d'apprécier les capacités professionnelles, techniques et financières du candidat, la deuxième ayant pour objet de déterminer quelle est, l'offre qui présente le caractère économiquement le plus avantageux.

Partant, à l'occasion de la deuxième phase réservée à l'appréciation des offres, seuls peuvent être utilisés les critères relatifs à la valeur même de l'offre, sans références aux capacités professionnelles, techniques et financières du candidat.

Cette distinction qui résulte des articles 52 et 58 du CMP en matière d'appel d'offres ouvert avait ainsi conduit le conseil d'Etat à juger illégal un règlement de consultation faisant de la qualification professionnelle des entreprises un critère de sélection des offres. (voir notamment, CE, 29 décembre 2006, n° 273783, société Bertele SNC.)

La jurisprudence applicable en la matière avait cependant nuancé l' imperméabilité des deux phases de la sélection en précisant que la mobilisation effective des moyens humains sur le chantier, ainsi que la qualification professionnelle desdits moyens humains, pouvaient valablement être pris en considération au stade de l'évaluation des offres (voir notamment, CAA Lyon, 9 juin 2005n° 99LYO1130)

Une décision de la CJCE, 24 janvier 2008 (aff. C-532/06, Emm. G. Lianakis AE e. a. c/ Dimos Alexandroupolis e. a.) est venue un temps semer le trouble sur le maintien de cette position nuancée.

La Cour Européenne a en effet été amenée à préciser que la directive 92/50 "s'oppose à ce que, dans le cadre d'une procédure d'adjudication, le pouvoir adjudicateur tienne compte de l'expérience des soumissionnaires, de leur effectif et de leur équipement ainsi que de leur capacité à fournir le marché au moment prévu non à titre de "critères de sélection qualitative", mais à titre de "critères d'attribution".

Une lecture littérale de la position de la Cour Européenne aurait du conduire à imposer une séparation très stricte entre les phases de la sélection, condamnant les nuances de la jurisprudence française en la matière.

Il n'en est rien. Le Tribunal Administratif de MARSEILLE a, une nouvelle fois, maintenu sa jurisprudence ancienne sans tenir compte de la position des juges de Luxembourg.

Dans une Ordonnance du 23 novembre 2009 le Tribunal a en effet précisé que le critère "des moyens du candidat sur le chantier" se rapporte bien à l'examen des offres, dés lors que son objet concerne l'exécution même des travaux objet de la consultation, et plus précisément, les moyens humains et matériels que le candidat affectera ou mettra en œuvre sur le chantier."

Il faut ici reconnaitre la position pragmatique des Juridictions Administratives qui ne souhaitent pas priver les pouvoirs adjudicateurs d'un critère couramment utilisé et jugé irremplaçable pour apprécier la valeur technique réelle d'une offre.

Cependant, la prise en compte de l'évolution dictée par les juges de Luxembourg, en limitant la vérification de l'aptitude technique et professionnelle du candidat à la première phase, n'aurait pas manqué d'avoir des répercutions favorables.

Une application stricte de la décision de la CJCE aurait sans doute amené les pouvoirs adjudicateurs à mener une réflexion plus approfondie sur la définition des besoins et ainsi à développer des critères plus en adéquation avec leurs objectifs.

La pauvreté de la présentation des offres sur le plan technique est en effet souvent le reflet d'une carence dans la définition de ses besoins par le pouvoir adjudicateur.

Une telle position aurait en outre conduit les candidats a développer une présentation plus innovante de leurs offres en délaissant la simple énumération des personnels assorti de leur Curriculum Vitae pour se concentrer sur les process ou mode d'organisation particulier mis en œuvre sur le chantier.


Mathieu CEZILLY





Cet article n'engage que son auteur.

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