Le droit de l'urbanisme applicable aux yourtes et autres tipis
Auteur : ROUSSE Christian
Publié le :
28/04/2011
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2011
Depuis plusieurs années l'exotisme de cette forme d'habitat a entrainé son développement en France principalement dans le cadre de nouveaux modes d'hébergement hôtelier.
Le régime applicable aux yourtes et autres tipis
Depuis plusieurs années l'exotisme de cette forme d'habitat a entrainé son développement en France principalement dans le cadre de nouveaux modes d'hébergement hôtelier. De manière plus ou moins marginale, la yourte est également utilisée comme habitation principale, à l'année, constituant alors une forme d'habitat dit "précaire".
A plusieurs reprises le ministère en charge de l'urbanisme a été sollicité par des parlementaires souhaitant avoir des indications précises sur le régime juridique applicable aux yourtes notamment. A chaque fois le Ministère a formulé substantiellement la même réponse (dernièrement Rép. Min JO Sénat 24/03/2011, p.715 sous Questions Mr le Sénateur J-L MASSON, JO Sénat du 22/04/2010, p.98, n°09969 et n° 13158). Il rappelle ainsi qu'il n'existe aucun vide juridique en la matière, ce mode d'occupation des sols faisant appel aux régimes juridiques d'autorisation prévus par le code de l'urbanisme.
Le critère mis en avant par le ministère concerne l'équipement de confort de la yourte. En l'absence d'équipements de confort, la yourte doit ainsi être considérée comme une tente au sens du droit de l'urbanisme (1). En revanche, dans l'hypothèse ou une yourte comporte certains éléments de confort tels blocs de cuisine ou sanitaires elle doit recevoir la qualification d'Habitation légère de loisir (2).
1. Les yourtes qui ne contiennent aucun équipement de confort doivent être assimilées à des tentes
Dans cette hypothèse le régime juridique applicable sera celui du camping prévu par les articles R-111-41 et suivants du Code de l'urbanisme. Selon ces articles la pratique du camping est libre hors l'emprise des routes et voies publiques avec l'accord de celui qui a la jouissance du sol, sous réserve, le cas échéant de l'opposition du propriétaire. En ce domaine c'est donc un principe de liberté qui s'applique. Mais cette liberté est très encadrée par le Code de l'urbanisme.
En premier lieu ce principe de liberté ne concerne que le camping pratiqué individuellement et ponctuellement puisque le camping pratiqué en groupe nécessite, selon le cas, d'obtenir un permis d'aménager ou une déclaration préalable en fonction du nombre de campeur ou du nombre de tente (R-421-19 c et R-421-23 c).
En second lieu, l'article R-111-42 du Code prévoit que la pratique du camping est interdite dans les espaces fragiles bénéficiant d'un classement au sens du droit de l'urbanisme ou du droit de l'environnement.
Enfin, il est toujours possible pour un maire de limiter le camping dans certaines zones du PLU, au titre de ses pouvoirs de police générale ou pour préserver les sites (R-111-43).
2. Les yourtes qui comportent des éléments de confort doivent être assimilées à des Habitations légères de loisir (HLL)
Les HLL sont des constructions démontables ou transportables, destinées à une occupation temporaire ou saisonnière à usage de loisir (R-111-31). Elles ne comportent pas de fondations, dans le cas contraire elles seraient considérées comme de véritables bâtiments (Cass, crim, 15 juin 1999, n° 98-83.962).
Les yourtes ne comportent pas de fondations et constituent une forme d'habitat saisonnier et démontable. Il est donc tout à fait exact de leur appliquer le régime des HLL.
2. 1. Le régime applicable dans les structures collectives de loisirs
Les HLL ont en principe vocation à prendre place dans des structures d'accueil collectives telles que terrain de camping, village de vacances ou parcs résidentiels de loisir. Puisque l'ouverture de ces structures d'accueil est soumise à autorisation ou à déclaration, l'installation d'une habitation légère de loisir y est exemptée de toute formalité, sous réserve de ne pas dépasser 35 m2 de SHON (R-421-2 b). Au-delà une déclaration préalable est nécessaire (R- 421-9 b).
2.2. Le régime applicable en dehors des structures collectives de loisirs
2.2.1. Soumission de principe des yourtes à autorisation d'urbanisme
Il est possible d'installer des HLL en dehors de toute structure d'accueil. Dans cette hypothèse ces HLL doivent être considérées comme des constructions nouvelles au sens des articles L- 421-1 et L-421-4 du Code qui prévoient que les constructions nouvelles, même ne comprenant pas de fondations, sont soumises à autorisation. Les yourtes seront ainsi soumises à déclaration préalable entre 2 et 20 m² de SHOB (R-421-1) et à permis de construire au delà de 20 m² de SHOB (R-421-9 a).
Il est regrettable que le ministère n'ait pas envisagé deux modalités particulières du permis de construire, à savoir, le permis concernant les constructions saisonnières (L-432-1 et suivants) et surtout le permis précaire (L-433-1 et suivants). Ces modalités de permis de construire permettent de prendre en compte le caractère saisonnier d'une construction destinée à être régulièrement installée et démontée et semblent donc particulièrement adaptées aux yourtes et autres tipis.
Par ailleurs, la réponse ministérielle attire l'attention des autorités compétentes pour la délivrance des autorisations d'urbanisme sur la question du raccordement des yourtes aux réseaux. Il est ainsi conseillé d'avoir recours à l'article L-111-4 du Code pour refuser la délivrance d'autorisations lorsque le raccordement aux réseaux nécessite des travaux.
Enfin, cette réponse ministérielle contient un rappel utile aux règles de droit pénal de l'urbanisme applicables en cas de construction sans autorisation. L'autorité compétente (Maire ou préfet) a ainsi la possibilité de dresser un procès verbal d'infraction à la suite duquel elle pourra ordonner, par arrêté motivé, l'interruption des travaux (L-480-2). Afin de vérifier le respect des règles d'urbanise l'autorité compétente pourra user de son droit de visite pendant l'installation de la yourte et après son achèvement (L-461-1).
Cette autorité pourra en outre faire application de l'article L-480-14 du Code qui permet, depuis la loi "Grenelle II", d'engager une action civile afin d'obtenir la démolition d'une construction réalisée sans autorisation, en méconnaissance de celle-ci ou, lorsqu'aucune autorisation n'est nécessaire, en violation des règles de fond.
2.2.2 Exception : l'exonération de toute formalité au titre du Code de l'urbanisme
Il semblerait que dans certains cas, l'installation de yourtes disposant d'éléments de confort puissent bénéficier des dispositions de l'article R-421-5 du Code selon lesquelles les constructions implantées pour une durée n'excédant pas trois mois sont exonérées de toute formalité au titre du code de l'urbanisme, y compris du respect des règles de fond, sauf le cas de l'installation dans l'emprise d'un secteur protégé (L-421-8). Le propriétaire d'une yourte pourrait déplacer celle-ci sur son terrain tous les trois mois évitant ainsi toute sanction pénale…
Cet article n'engage que son auteur.
Crédit photo : © Jan Beltz - Fotolia.com
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