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Permis de construire : quelles sont les conditions d'annulation partielle ?

Permis de construire : quelles sont les conditions d'annulation partielle ?

Auteur : ROUSSE Christian
Publié le : 04/11/2015 04 novembre nov. 11 2015

Dans un arrêt du 1er octobre 2015, n° 374338, le Conseil d'Etat précise le régime des annulations partielles de permis de construire en affinant les conditions d'application de l'article L. 600-5 du Code de l'urbanisme.Pour rappel, le mécanisme d'annulation partielle permet au juge administratif de confirmer la partie de l'autorisation qui ne souffre d'aucune illégalité et de limiter l'annulation du permis aux seules dispositions illégales, à charge pour le pétitionnaire de régulariser ensuite la partie du projet affectée d'illégalité.

Autrement dit, il s'agit d'une solution pragmatique qui permet au titulaire d'un permis de construire attaqué d'éviter l'annulation de l'intégralité du permis dont une partie seulement est entachée d'une illégalité qui pourrait être régularisée.

Pour l'administration, cela permet d'éviter d'avoir à instruire de nouveau la partie régulière du projet et donc de gagner du temps.

Dans la décision du 1er octobre 2015 qui nous intéresse, le Conseil d'Etat rappelle en les précisant les deux hypothèses dans lesquelles l'annulation partielle peut être obtenue.



I- Première hypothèse : L'autorisation est divisible

Le Conseil d'Etat rappel ici une solution déjà ancienne : lorsque les éléments du projet de construction ou d'aménagement auraient pu faire l'objet d'autorisations distinctes, le juge peut prononcer l'annulation partielle de l'arrêté attaqué en raison de la divisibilité des éléments composant le projet litigieux.

Il s'agit, par exemple, d'un projet complexe pour lequel un seul permis a été sollicité alors que plusieurs autorisations distinctes auraient pu être sollicitées.



II- Deuxième hypothèse : L'autorisation n'est pas divisible mais la partie illégale du projet est susceptible d'être régularisée par un permis modificatif

Cette hypothèse est envisagée par l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme au terme duquel :

"Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, peut limiter à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixer le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation."

Autrement dit, dans cette hypothèse la partie illégale du projet n'est pas divisible du reste du projet mais correspond à une partie identifiable du projet susceptible d'être régularisée.

En pratique, il s'agira par exemple d'un nombre insuffisant de place de stationnements créés ou encore d'un défaut d'implantation de la construction sur son terrain d'assiette.

SOUS QUELLES CONDITIONS ?

La décision du 1er octobre 2015 précise le régime de l'article L. 600-5 du Code de l'urbanisme pour lequel le Conseil d'Etat avait d'ores et déjà apporté certaines précisions.

(Voir : CE, 1er mars 2013, n° 350306 et l'excellent article de Me Anne MEUNIER du 25/06/2013)



2.1 La partie illégale du projet n'a pas à être matériellement détachable du reste du projet

Autrement dit, il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de bâtiments distincts ou d'une partie de construction matériellement détachable telle qu'une villa et son garage, une villa et sa piscine ou encore une antenne relais et son local technique.


2.2 La partie illégale du projet doit pouvoir faire l'objet d'un permis modificatif

Cette condition ressort expressément de la lettre de l'article L 600-5 du Code de l'urbanisme.

Dans sa décision du 1er octobre 2015, la Haute juridiction précise cette condition :

2.2.1 Les travaux autorisés par le permis initial ne doivent pas être achevés

En effet, si les travaux sont achevés il n'est plus possible d'obtenir un permis modificatif.

La haute juridiction apporte ici deux précisions particulièrement intéressantes :

  • Le bénéficiaire du permis, qui a finalement un certain intérêt à limiter l'annulation de son autorisation à une annulation partielle, n'a pas à établir devant le juge l'absence d'achèvement de la construction.
  • Le juge n'est pas tenu de procéder à une mesure d'instruction pour s'assurer que la construction n'est pas achevée.
Autrement dit, il appartient au seul demandeur à l'annulation de prouver que les travaux sont achevé et qu'une annulation partielle est exclue.


2.2.2 Les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité ne doivent pas pouvoir être regardées, de par leur nature ou leur ampleur, comme remettant en cause sa conception générale

Si la régularisation de l'illégalité nécessite un bouleversement de la conception générale du projet initial, l'annulation partielle n'est pas envisageable.

La haute juridiction apporte une précision essentielle sur ce point en considérant que :

"La seule circonstance que ces modifications portent sur des éléments tels que son implantation, ses dimensions ou son apparence ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce qu'elles fassent l'objet d'un permis modificatif"

* * *

Faisant strictement application de ces principes, le Conseil d'Etat censure la cour administrative d'appel de Bordeaux qui, pour juger que l'illégalité affectant le permis n'était pas régularisable, avait relevé que les balcons, à l'origine de l'illégalité du permis de construire, constituaient, de par leurs caractéristiques architecturales et leur inclusion dans les immeubles, des "éléments indissociables" du projet.

La circonstance que la partie illégale du projet constitue un "élément indissociable" du projet n'exclut pas l'application de l'article L. 600-5 du Code de l'urbanisme si l'ensemble des conditions précitées sont réunies.



CE QU'IL FAUT EN RETENIR :

L'annulation partielle d'un permis de construire peut être prononcée y compris si la partie illégale du projet n'est pas matériellement détachable du reste du projet.

L'annulation partielle n'est toutefois envisageable que si la partie illégale du projet est susceptible d'être régularisée par un permis modificatif ce qui suppose que :

  • Les travaux autorisés par le permis initial ne sont pas achevés
  • Les modifications apportées au projet initial pour remédier au vice d'illégalité n'ont pas pour conséquence, de par leur nature ou leur ampleur, de remettre en cause sa conception générale


Cet article n'engage que son auteur.

Crédit photo : © herreneck - Fotolia.com

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